Le Tigre
(in Les Chants de l’Innocence et de l’Expérience,
trad. Alain Suied, éditions Arfuyen)
Tigre, Tigre ! ton éclair luit
Dans les forêts de la nuit,
Quelle main, quel œil immortels
Purent fabriquer ton effrayante symétrie ?
Dans quelles profondeurs, quels cieux lointains
Brûla le feu de tes yeux ?
Aucune aile ne pourrait les atteindre.
Aucune main ne pourrait forger ton regard.
Et quelle épaule et quel art
Purent tordre les fibres de ton cœur ?
Et quand ce coeur commença de battre,
Quelle main, quel pied surhumains ?
Qu’était le marteau ? Que fut la chaîne ?
Quelle fournaise forgea ton cerveau ?
Sur quelle enclume ? Quelle effrayante étreinte
Osa fondre en toi ses terreurs de mort ?
Quand les étoiles abandonnèrent leurs lances,
Et trempèrent le ciel de larmes,
A-t-il souri de l’œuvre accomplie ?
Celui qui créa l’Agneau a-t-il pu te créer ?
Tigre, Tigre ! ton éclair luit
Dans les forêts de la nuit,
Quelle main, quel œil immortel
Osèrent fabriquer ton effrayante symétrie ?
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